LE QUOTIDIEN DES ENFANTS. Didier FAVRE

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LE QUOTIDIEN DES ENFANTS

Didier FAVRE, responsable national formation à l’ACEPP

Octobre 2000

CHAPITRE LE PROJET PARENTAL, UN PROJET D’ETABLISSEMENT (PROJET ASSOCIATIF ET SOCIAL – PROJET EDUCATIF ET PEDAGOGIQUE)

Préambule : Dans cette partie, nous nous proposons de procéder à un certain nombre de distinctions autour du projet parental (dit d’établissement) et de ses déclinaisons (« projet associatif et social – projet éducatif et pédagogique d’éveil et de soin »).

Par projet parental nous entendons ce que vous souhaitez mettre en œuvre en tant que parent pour votre enfant (et les enfants) dans cette structure d’accueil : le projet d’établissement.

Sur le plan opérationnel, tous les types de documents cités en sous-titre ne sont pas forcément nécessaires à établir. Néanmoins, les points de repères qui suivent vous aideront à savoir ce que vous faites ou souhaitez faire quand vous construisez un projet (ou que vous souhaitez en tenter une première évaluation). Au regard du décret du 06/08/2000 (art. 180-10) vous avez obligation d’établir au moins « un projet éducatif pour l’accueil, le soin, le développement, l’éveil et le bien être des enfants, ainsi qu’un projet social » (d’autres éléments suivent et dont vous devez faire mention).

Le cœur de toute institution associative se trouve dans la formulation de son projet d’établissement dont les statuts et le règlement intérieur (art.R.180-11, décret 6 août 2000) sont les témoins formels, décrivant les règles et repères qui s’imposent à tous, parents, usagers et co-éducateurs, professionnels, adultes en insertion et/ou formation, etc.

Tout projet qui vise à organiser le quotidien d’un lieu d’accueil comporte une part idéologique : il vous faudra donc identifier quelles sont les valeurs qui sous tendent sa mise en œuvre (elles sont bien sur très présentes dans les énoncés et choix qui suivent).

Différents outils à définir autour du projet d’établissement ou de service : des fonctions et des missions précises

Un projet d’établissement : le projet parental. Ce projet d’établissement englobe toutes les déclinaisons que nous allons développer maintenant.

* Le projet parental est tout d’abord le sens, la place et le rôle que les parents souhaitent s’attribuer dans le cadre du fonctionnement et de la gestion du lieu d’accueil. Les deux documents légaux, les statuts et le règlement intérieur, nécessaires à la déclaration, à l’ouverture et au fonctionnement de la structure rendrons compte de ce « sens » là.

* Le projet associatif est le premier à être formulé. Il est en général contenu dans l’objet même de l’association (statuts) mais il est nécessaire de veiller à en étendre la finalité initiale et fondatrice (celui de la garde d’enfant) par une finalité « sociétale » : quel est le sens et la place de cette association dans son environnement proche (autres associations, partenariats institutionnels, passerelles avec l’école, etc.) ? Comment est envisagée l’implication et la participation de tous les parents à la vie associative (quelque soient les origines culturelles / sociales et dispositions de chacun) et dans la mise en place des instances associatives (conseil d’administration, bureau, commissions, etc.) ?

Ce projet associatif est fondateur de la dynamique institutionnelle. Inscrit dans les statuts il fonde son objet, et définit le sens même de ce service.

* Le projet social vient en second lieu et découle directement de la formulation du projet associatif. A la différence du projet associatif dont la vocation est « institutionnelle », le projet social s’adresse aux usagers et appartient à ceux-ci. Il ne peut se formuler sans leur participation. Sa fonction évolutive est ainsi manifeste (bien entendu le projet associatif peut être modifié, il n’y a pas d’exclusive dans mon propos).

Ce projet social vise à prendre en compte les usagers et leur environnement : quartier ou territoire avec son histoire spécifique, ses dimensions économiques, sociales et culturelles. En quoi ce mode de garde prend t’il en compte dans le service qu’il propose, les besoins réels (contraintes horaires, économiques, culturelles, etc.) de la population qui l’entoure en terme d’accueil de l’enfant ? En quoi et comment les dimensions spécifiques économiques, culturelles et sociales des familles sont elles reconnues dans l’accueil des enfants et de leurs parents ? Quelle est son ouverture à la diversité sociale et culturelle, et au delà à toutes les différences (handicaps, etc ;) ? Comment est envisagée la participation de tous les parents à la vie de la structure d’accueil et à son projet, et notamment la participation éducative et institutionnelle ?

A minima celle-ci recouvre la mise en place, la tenue et les modalités de participation au Conseil de Crèche (décret de 1983) ou d’établissement (sauf pour les établissements à gestion parentale les usagers étant les gestionnaires).

* Le projet éducatif et / ou pédagogique (d’éveil et de soin) sont donc un troisième niveau de formulation des différents projets mentionnés.

- Tissé par les valeurs éducatives de chacun, le projet éducatif vise à formuler les principes collectifs à mettre en œuvre pour permettre la prise en charge des enfants. Il prend en compte la dimension de participation des parents, les modalités de partenariat parents – professionnels, les rôles, missions et taches de chacun (parent ou professionnel), le « qui fait quoi et quand, et pour qui ? » l’organisation du quotidien dans le lieu d’accueil, la co-éducation ou toutes les formes possibles ou choisies pour permettre l’implication de chacun selon ses moyens, ses possibilités ou ses désirs, quelles que soient les formes prises par celles-ci.

- Le projet pédagogique (d’éveil et de soin) est en fait une traduction professionnelle par l’équipe et négociée avec les parents des moyens du projet éducatif à mettre en œuvre pour réaliser les objectifs formulés par le projet éducatif. Celui-ci indique les finalités du projet collectif d’éveil et de soin, et traite de questions concrètes : quel lieu d’accueil veut on pour les enfants ? Comment organiser la vie quotidienne, les repas, la sieste des petits et les jeux des grands ? Quelle place aux questions d’éveil et de santé dans l’éducation des jeunes enfants ? Il relève pour moi de la compétence des équipes au regard de leur savoir faire et de leurs compétences. Comment les professionnels vont mettre leurs compétences au service du meilleur projet possible pour les enfants et leurs familles ? Quels choix opérer tenant lieu des contraintes d’espace, de matériel, de l’âge des enfants accueillis, etc. ? Ce projet pédagogique est débattu et adopté par l’association. Il est la traduction officielle du projet d’équipe des professionnels. Certains écrivent un projet d’équipe afin de formaliser ce qui fait accord dans l’équipe professionnelle.

En guise de synthèse : comment l’écrire ?

Le projet d’établissement se décline autour de 4 axes : valeurs à promouvoir, objectifs à atteindre, moyens à mettre en œuvre dont la définition du rôle de chacun (fonction et mission des parents, professionnels, salariés), enfin les règles et instances de suivi/contrôle.

Vous devez en outre intégrer tous les éléments spécifiés aux articles 180-9 à 180-13 du décret du 6 août 2000.

Préambule : la règle d’or de tout projet est de partir d’abord de l’identification (que vous faites) des besoins des enfants, âge par âge ; puis de décliner ensuite les spécificités de chaque intervenant adulte, parent, professionnel ou non – sans oublier les salariés en contrat aidé (au regard des situations particulières et positions employeur ou salariés : demandes, besoins, attentes, désirs, exigences et obligations, droits et devoirs de chacun)

* Les valeurs : ce à quoi doit servir le lieu d’accueil vis à vis des enfants, des familles mais aussi des professionnels. Quelles idées doit il mettre en avant, quel intérêt pour les enfants, pourquoi mélanger ou non les enfants, les rythmes de chacun, besoins différents à respecter, démarche de soins et d’éveil, quelles valeurs éducatives collectives promouvoir (ordre, liberté, règles communes, points de repères), le lien à l’environnement, la relation avec les apprentissages (précoces ou non), la relation avec l’école, les activités organisées ou le jeu libre, intérêt de la participation parentale ou de la co-éducation, etc.

* Les objectifs : ils visent en premier lieu les enfants et le projet éducatif et pédagogique d’éveil et de soin qui leur est destiné. Cependant, lesquels nommer ? Que faut-il se donner comme ligne directrice, que doit-on atteindre collectivement pour la satisfaction des besoins des bébés (calme, sécurité, jeu, stimulation adaptée, environnement, qu’attend t’on des 2 à 3 années passées dans ce lieu d’accueil, quelle doit être la vie de ce collectif d’adultes réunit autour de l’accueil et de l’éducation de très jeunes enfants, la mission de cette structure dans son environnement au regard de l’accueil de toutes les familles, etc.

* Les moyens à mettre en œuvre dont la définition du rôle de chacun (fonction et mission des parents, professionnels, salariés) :

Comment doit être organisé le quotidien pour permettre la réalisation des objectifs signalés et respecter les valeurs affichées, comment se passe l’accueil des enfants et de leurs familles le matin ainsi que les retrouvailles du soir, au regard de l’espace disponible et de son organisation  comment respecter et équilibrer la vie des plus petits et leur rythme spécifique avec le besoin des plus grands de jouer, crier, bouger, rigoler, expérimenter, découvrir, etc.

* Les règles et instances de suivi/contrôle : le règlement intérieur donne la première base réglementaire pour le fonctionnement et l’ouverture du lieu d’accueil (horaires, fonctions et rôles de chacun notamment du responsable technique et continuité de la fonction en son absence, admission, horaires et conditions de départ des enfants, tarifs, concours du médecin, soins, intervention d’urgence, information et participation des parents à la vie de l’établissement, modalités de collaboration, fonctions déléguées au responsable technique), etc. En fait, à partir de tous ces points, ce règlement intérieur doit évoluer au fur et à mesure des difficultés rencontrées afin de prendre en compte les situations vécues et rester un document vivant et utile pour tous.

L’enrichissement du règlement intérieur (et de son respect surtout) témoigne de la bonne santé institutionnelle de la structure d’accueil. Et donc de la qualité de ce qui est proposé aux enfants. Ce qui compte ici avant tout, et de se rappeler que la qualité de vie du collectif d’adultes a une incidence déterminante sur le quotidien des enfants.

La mise en place de réunions où parents et professionnels peuvent traiter ensemble et séparément de leurs difficultés – mais aussi parler du quotidien vécu avec les enfants – est essentiel à la qualité de vie de l’association. La séparation de temps consacré au pédagogique et à l’administratif est souvent mis en place ; ainsi que la mise en place de commissions thématiques permettant à de plus petits groupes une expression plus aisée pour chacun, sur des thèmes souvent très sensibles.

Enfin il est toujours utile de préciser qu’il s’agit avant tout d’organiser le dialogue ou la négociation entre les partie et non pas de chercher le consensus. Celui-ci ne peut aboutir que si les conditions du dialogue sont réunies.

* Comment l’évaluer ?

A partir des compte rendus de réunions mensuelles (conseils d’administration, rapports des commissions, évolutions du règlement intérieur dans l’année, difficultés rencontrées, décisions prises dans l’année, il sera procédé à la reprise du projet en rediscutant de chacun des points, de leur pertinence, de leur utilité et de leur actualité pour la pérennisation du projet.

 

 

Nota Bene : une importance particulière doit être accordée à la définition et répartition des rôles entre parents et professionnels, notamment au quotidien. En effet, la difficulté de l’établissement à gestion parentale est la situation particulière d’usagers devenant gestionnaires et donc employeur « virtuellement » des salariés avec qui ils interviennent sur le plan éducatif au quotidien et qui accueillent leurs enfants. Ainsi, il y a :

Des repères fondamentaux à ne pas oublier :

1.  Le premier point est de toujours mettre en avant que c’est l’association qui emploie et non les parents individuellement (le Président est le représentant de la fonction employeur)

 

2.  Le second point est de définir les missions des professionnels et notamment du responsable technique et de clairement mandater ce dernier pour le respect du règlement intérieur au quotidien (règles et repères) applicable pour tous (parents, adultes, salariés, etc.)

3.  Le troisième est de préciser le rôle des parents lors des permanences où il a en charge l’ensemble des enfants avec les professionnels (il ne faut en aucun cas évacuer la place du parent et de son rôle en le réduisant à s’occuper de son propre enfant, ce serait se priver d’une grande richesse). Notamment les parents apportent « l’inattendu » là où le professionnel a la charge de « faire tourner » la structure au quotidien en veillant à ce que la place de chacun et les besoins de chaque enfant soit respecté.

Repères et Synthèse :

·  Le projet d’établissement précise l’utilisation des locaux pour permettre la mise en œuvre du projet éducatif, règles d’hygiène et de confort afin de permettre une attention constante aux enfants et organiser l’espace au mieux en fonction de leurs besoins, des repas, du sommeil et du repos, les soins corporels et activités de jeu et d’éveil ; il doit veiller aussi à permettre l’accueil des parents et l’organisation de réunions pour le personnel

 

·  Le projet parental précise le sens, la place et le rôle que les parents souhaitent s’attribuer dans le cadre du fonctionnement et de la gestion du lieu d’accueil.

·  Le projet associatif mentionne l’objet même, la finalité de l’association (statuts). Il est nécessaire de veiller à étendre celle-ci à une dimension « sociétale » : quel est le sens et la place de cette association dans son environnement proche ?

·  Le projet social découle du projet associatif. Il s’adresse aux usagers et appartient à ceux-ci. Il ne peut se formuler sans leur participation, et vise à prendre en compte les usagers et leur environnement : quartier ou territoire avec son histoire spécifique, ses dimensions économiques, sociales et culturelles.

·  Le projet éducatif formule les principes collectifs à mettre en œuvre pour permettre la prise en charge des enfants. Il prend en compte la dimension de participation des parents, les modalités de partenariat parents – professionnels, les rôles, missions et taches de chacun.

·  Le projet pédagogique (d’éveil et de soin) est la traduction professionnelle par l’équipe des moyens à mettre en œuvre pour réaliser les objectifs formulés par le projet éducatif. Il relève pour moi de la compétence des équipes au regard de leur savoir faire et de leurs compétences. Certains écrivent un projet d’équipe afin de formaliser ce qui fait accord dans l’équipe professionnelle.

Didier FAVRE, responsable national formation à l’ACEPP,

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